Les pêcheurs de Rivoli

Imaginez bien, c’est dimanche, le printemps est installé, il fait beau et chaud, même trop chaud pour la saison mais votre éco-anxiété et vos allergies ne parviennent pas à éteindre le feu sacré du retour à la vie après l’excès de flotte tombé pendant l’hiver. Vos ami·es sont chez vous depuis la veille et vous décidez d’aller vous balader dans le parc à côté de la maison. C’est un parc immense dans la ville, vous pouvez y marcher/courir/promener votre chien pendant des bornes sans vous ennuyer, il y a la rivière, les fleurs, les aires de jeux, les terrains de pétanque et de basket, des vaches, des chèvres et beaucoup de verdure. Vraiment, c’est cool.

Nous voici donc marchant vers le printemps, appareil photo au cou, quand, au bord de la rivière pêchent trois personnes qui nous interpellent. Un homme, un jeune homme et un petit garçon, nous demandent si on peut les prendre en photo. Malgré la facilité déconcertante du selfie, les gens demandent encore souvent, cela dit ici, pas de smartphone tendu. Je vais spontanément vers eux mais l’enfant me met un stop : “Ah non ! Moi je veux pas être pris en photo !” Trop occupé à pêcher, aucune envie d’être dérangé. Pas de problème, lui dis-je, continue à faire ce que tu fais, je te prends en photo pendant que tu pêches, je ne t’embêterai pas, c’est promis. Il consent et je fais les photos de ces trois-là en train de pêcher (enfin c’est le petit qui pêche, rendons à César ce qui lui appartient). Puis l’homme plus âgé me demande un portrait de lui, ce que j’accepte sans broncher. Je demande une adresse mail et envoie les images le soir-même après une retouche rapide.

Ça m’a pris cinq minutes à tout casser. Les photos sont très simples, j’ai même réussi à en rater plusieurs (je ne les ai pas envoyées), mais c’est une interaction qui m’a beaucoup plu. Je pratique la photo de rue (et de plage) de manière effacée, je ne vais jamais voir les gens pour leur demander de poser pour moi. D’une part parce que ce n’est pas la façon dont je souhaite travailler, d’autre part parce que j’ai assez de timidité en moi pour m’en empêcher. Mais si on me demande, un dimanche, au soleil, dans le parc, avec le plus grand de tous les chill, je fonce et c’est gratuit. J’aurais peut-être pu faire autrement, mieux, je ne sais pas, à vrai dire j’ai été prise au dépourvu (c’est d’ailleurs pour ça que j’ai raté autant de photos) mais j’ai trouvé ça sympa alors merci à cette fine équipe.

Panier
Retour en haut