Je me dis souvent que ce qui rend la vie plus supportable, c’est le principe de découverte. Quel que soit le domaine. Personnellement, je suis contente de passer ces longues années à écouter des artistes jamais ou peu entendu·e·s auparavant, qu’ils ou elles existent depuis Mathusalem ou seulement cinq minutes. C’est un processus sans fin mais heureux. Je mourrai en sachant que je n’ai pas tout écouté mais ça va, et de toute façon choisir c’est renoncer.
Il suffit d’utiliser Spotify et YouTube pour avoir accès à toute (ou presque) la musique du monde, à 17 ans j’en rêvais. Cette année-là (2003), je découvrais la musique dite alternative en regardant la télé tard le soir et j’achetais des CD au hasard à la Fnac. Je suis un peu nostalgique de cette époque mais je préfère quand même les moyens actuels, bien plus accessibles. Techniquement d’abord, mais ça rend aussi la musique moins élitiste. Du moins sur le papier car vous et moi savons bien que contre la connerie humaine, on ne peut rien faire.
Viennent toujours des moments dans ma vie où de la musique s’impose à moi. Si je n’étais pas aussi nihiliste, je pourrais dire que l’univers me parle ou bien que c’est parce que j’ai aperçu des heures miroirs la veille. Mais bon, je ne crois en rien, pas même en la chance. La nuit dernière, je n’ai trouvé le sommeil qu’au lever du jour. Mais avant ça, j’ai regardé le concert de PJ Harvey à Rock en Seine 2017 sur Culturebox. PJ Harvey est dans un coin de ma tête depuis des années. Elle et moi avons passé un accord tacite, celui de lui consacrer mon temps. Un jour…
Je connais PJ Harvey. Je connais son visage, sa voix, ses pochettes d’albums, son histoire avec Nick Cave mais je ne peux sans doute citer que cinq morceaux et certainement pas tous les titres de ses disques. D’ailleurs, je n’en ai jamais écouté un seul en entier. Le problème est là, PJ Harvey m’est sporadique (nous partirons du principe que ça veut dire quelque chose).
Depuis que je suis gamine, quand j’entends de la musique qui me plaît beaucoup, je ne pense plus qu’à ça. C’est une passion subite, c’est excitant, c’est la découverte. Je la croisais tous les jours sur un quai de gare bondé et je suis enfin montée dans le même train que PJ Harvey. Il a suffi d’une insomnie et du hasard de la programmation pour nous mettre en phase.
Il ne faut pas s’en vouloir de ne pas avoir fait les choses avant et il ne faut pas en vouloir aux autres. Ces affaires-là prennent du temps et méritent une sérieuse considération.
Alors comme son heure est venue, je fais honneur à PJ Harvey et plonge en immersion. Tout vient à point à qui sait attendre.
Photo : Frans Schellekens/Redferns, 2000, Amsterdam
La même pour plein d’artistes. Spécialiste en rien sauf en coups de coeurs sporadiques. Toujours l’impression d’avoir un train de retard et, même quand j’ai réussi à sauter dedans en avance, celle de ne pas avoir creusé suffisamment le truc pour être légitime pour en parler en tant qu’early adopter de la hype.
En matière de musique (et sûrement d’art dans sa globalité), la légitimité c’est vraiment un truc pernicieux. Qu’y a-t-il de plus subjectif que la musique ? Il y aura toujours des glands pour te faire comprendre que ce que tu écoutes n’est pas assez bien, que tu ne fais pas comme il faut, et c’est à cause de ces cons-là que le problème de légitimité se pose. Et quand je parle de « sérieuse considération », c’est plus une discipline que je m’impose et je me fiche que les autres fassent la même chose que moi ou pas, on fait ce qu’on veut et il n’y a pas à décerner des bons ou des mauvais points. C’est très personnel ! Quant au train de retard, c’est parfois positif : il y a plein de choses qui sortent et sont bashées en temps réel, puis on redore le blason de l’artiste ou de son album des décennies plus tard, c’est très curieux (exemples : Abba ou encore l’album Low de David Bowie).